La prévention des entreprises en difficulté

Les aléas de la conjoncture et de l’activité de l’entreprise peuvent conduire celle-ci à rencontrer des difficultés de gestion, voire de paiement. Ces difficultés ont longtemps été appréhendées de manière sévère pour les dirigeants. Le droit a cependant évolué au cours du 20e siècle vers la notion de redressement des entreprises, puis vers celle de sauvegarde des entreprises, puis de prévention. Votre cours de droit de BTS NRC alternance, de BTS assistant manager alternance, ou d’un autre BTS en alternance vous explique ces évolutions.

Aujourd’hui encore, trop d’entreprises connaissent des difficultés mais hésitent à en faire part pour ne pas inquiéter les clients ou leur banque. Pour lutter contre cette attitude, l’information sur la situation de l’entreprise est privilégiée par le droit. De plus, certaines instances externes ou internes à l’entreprise sont en mesure de déclencher l’alerte afin d’attirer l’attention du chef d’entreprise sur les difficultés rencontrées. La loi du 26 juillet 2005 et sa réforme de 2008 maintiennent et confortent cet objectif de sauvegarde des entreprises en difficultés.

Une entreprise est considérée « en difficulté » lorsqu’elle connait des difficultés de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. Une entreprise est défaillante lorsqu’elle est en état de cessation de paiement (dépôt de bilan). La cessation de paiement se définit ainsi : l’actif disponible ne permet pas de faire face au passif exigible. Le passif exigible se définit comme l’ensemble des dettes dont les créanciers sont en droit de réclamer le paiement. L’actif disponible se définit comme l’ensemble des sommes dont l’entreprise peut disposer immédiatement pour régler ses dettes.

La prévention des difficultés passe par des mécanismes d’alerte mis en place, entre autre, à partir d’informations comptables et par leur recours à la conciliation.

Les obligations comptables

Tout commerçant a l’obligation légale de tenir une comptabilité et de dresser, à la clôture de chaque exercice, des comptes annuels en vue des enregistrements comptables. Les sociétés commerciales ont l’obligation annuelle de les déposer au greffe du tribunal de commerce : ces documents sont complétés par les rapports de gestion des dirigeants ainsi que par le procès verbal de l’assemblée générale. Ces différentes sources d’informations peuvent révéler des difficultés naissantes et servir de base pour une analyse plus détaillée de la situation.

Le droit d’alerte

La procédure d’alerte consiste à attirer l’attention du chef d’entreprise sur des indicateurs révélateurs de première difficulté afin d’obtenir des explications, ou de mettre en œuvre les moyens de redresser la situation. L’alerte peut venir du commissaire aux comptes, du comité d’entreprise, des associés ou du président du tribunal de commerce.

Le commissaire aux comptes est une personne physique inscrite sur une liste professionnelle chargée, par les associés, de contrôler de manière permanente les comptes dressés par les dirigeants et d’en certifier la régularité ainsi que la sincérité. Il déclenche l’alerte lorsqu’il relève, à l’occasion de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation.

Le président du tribunal de commerce peut convoquer les dirigeants d’une entreprise qui connaît des difficultés afin d’examiner avec eux les mesures propres à redresser sa situation. Il peut également enjoindre, sous astreinte, aux dirigeants de sociétés commerciales, de déposer leurs comptes annuels au greffe du tribunal.

La conciliation

La conciliation est une procédure ouverte devant le tribunal de commerce à la demande du débiteur. C’est une démarche facultative, non judiciaire, qui peut rester confidentielle. Elle permet à l’entreprise qui rencontre des difficultés importantes, mais non irrémédiables à court terme, de demander la nomination d’une personne indépendante : le conciliateur.

Le dirigeant de l’entreprise est le seul autorisé à demander l’ouverture d’une conciliation. Durant la procédure, tout est mis en œuvre pour que l’entreprise poursuive son activité ; le dirigeant reste à la tête de l’entreprise. Il aide l’entreprise à conclure un accord amiable avec ses principaux créanciers, dans le but d’obtenir des délais de paiement et des remises de dettes. Dans ce cas, l’entreprise doit respecter les nouvelles échéances sous peine de voir le tribunal annuler l’accord et subir les poursuites immédiates des créanciers.

Le traitement judiciaire des difficultés

Traiter les difficultés consiste à appliquer à une entreprise l’une des procédures collectives prévues par la loi : la sauvegarde, le redressement ou la liquidation judiciaire.

La procédure de sauvegarde

La sauvegarde est destinée à une entreprise dont les difficultés sont trop importantes pour être résolues par une conciliation, mais qui n’est pas en cessation de paiement. L’objectif de la sauvegarde est de faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. Seule l’entreprise débitrice peut demander l’ouverture d’une sauvegarde. Un dirigeant a intérêt à la solliciter, car sa diligence lui permettra par la suite d’échapper à des sanctions si la situation de l’entreprise venait à s’aggraver.

Suite au jugement d’ouverture, s’ouvre une période d’observation durant laquelle un diagnostic est réalisé sur la situation de l’entreprise. L’administrateur judiciaire établit un projet de plan de sauvegarde après concertation avec les créanciers sur les modalités de règlement du passif. Ce plan de sauvegarde est ensuite arrêté par le jugement du tribunal et contient les engagements pris par le débiteur.

La procédure de redressement judiciaire

Le redressement judiciaire s’adresse à une entreprise qui ne parvient plus à faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Le dirigeant fait sa DCP (déclaration de cessation de paiement) et le tribunal constate l’existence de la cessation de paiement lors du jugement d’ouverture qui nomme un administrateur judiciaire pour diriger l’entreprise.

Il opte soit pour le redressement judiciaire, soit pour la liquidation judiciaire immédiate si la situation de l’entreprise ne peut être redressée.

Au cours de la période d’observation, l’administrateur judiciaire prépare un projet de plan de redressement (plan de cession en cas de reprise ou plan de continuation).

La procédure de liquidation judiciaire

Si la situation de l’entreprise est irrémédiablement compromise et que son redressement se révèle impossible vu l’ampleur du passif, la liquidation est la seule issue. Elle est destinée à mettre fin à l’activité de l’entreprise.

Le tribunal nomme un liquidateur qui a pour principale mission de :

  • Réaliser l’actif, c’est-à-dire recouvrer les créances et vendre l’intégralité des biens de l’entreprise.
  • Apurer le passif, c’est-à-dire régler les créanciers pour éteindre les dettes de l’entreprise. L’actif étant insuffisant pour désintéresser les créanciers, le liquidateur les classe par ordre de priorité de paiement :
    • Les salariés qui sont des créanciers super privilégiés ; le paiement de leur créance est garanti par l’association de gestion du régime d’assurance des salariés (AGS) pour les 60 derniers jours de travail.
    • Les créanciers privilégiés disposant d’un privilège (trésor public, URSSAF) ou disposant d’une sûreté (hypothèque, nantissement, gage…).
    • Les créanciers chirographaires qui ne disposent d’aucune sûreté ni d’aucun privilège.

En fin de liquidation, le tribunal prononce le jugement de clôture de la liquidation. Il constate soit que le passif exigible est totalement éteint, soit que l’actif est insuffisant pour désintéresser les créanciers. Les créanciers impayés ne seront jamais désintéressés sauf s’ils parviennent à démontrer que le passif a été aggravé par des fautes de gestion du dirigeant.